Recension de la pensée de Jean-Baptiste Perret sur la scientificité des Sciences de l’Information et de la Communication



Crédit photo d'illustration: https://crps-beauvallon.be/

Jean-Baptiste Perret figure parmi les grands auteurs œuvrant dans les sciences de l’information et de la communication. Il est l’auteur du prestigieux ouvrage : « Les SIC : essai de définition » que nous avons lu dans le cadre du travail pratique du cours d’Epistémologie.

En effet, dans cette ouvrage, l’auteur lance un pavé dans le marre, en indiquant d’emblée je cite : « Chacun sait sur quoi portent les sciences de « l’information et de la communication ». Pour lui, les deux termes suffisent d’ailleurs à faire venir à l’esprit une série de pratiques sociales, de lieux, de techniques et d’acteurs, considérés par le sens commun comme relevant de ces domaines d’activités. Un manuel parmi d’autres de la discipline indiquera donc les champs ou domaines d’études suivants : les TIC (technologies d’information et de communication), les communications de masse, les communications commerciales et politiques, la communication organisationnelle. On pourrait ajouter à cette liste l’ensemble des messages dits « ordinaires », les échanges interpersonnels, les transformations du système des industries culturelles et de l’espace public, et bien d’autres phénomènes encore. Cette liste spontanée a pour mérite de fournir une première idée du champ scientifique tel que l’a formé sa jeune « tradition » : les travaux qui, reconnus comme importants, ont fédéré autour d’eux des courants de recherche durables.

L’ouvrage note que les Sic repose sur des domaines d’objets concrets. Or, plus d’un siècle d’épistémologie a suffisamment montré que la science n’explique pas les objets existants : elle se cherche des objets. C’est ce qu’on appelle construire des objets scientifiques. Les sciences de l’information et de la communication ont-elles un objet spécifique ? se questionne l’auteur. Rien n’est moins sur ! Il fait remarquer qu’une discipline n’existe pas sans remplir cette condition. Mais il n’est pas non plus d’objets scientifiques spécifiques sans discipline pour les construire… Ainsi, dit-il, « dans la mesure où les Sic sont aujourd’hui une discipline reconnue dont l’existence institutionnelle ne fait plus problème, c’est maintenant son autonomie dans le domaine de la connaissance qui est en jeu. Or, cette autonomie cognitive dépend de sa capacité à construire scientifiquement ses propres objets ».

Pour répondre a ce questionnement, il établit une cartographie des objets que les Sic se donnent. Il note que la construction des objets en Sic n’a guère à envier aux autres sciences humaines, même si ces dernières jouissent, vues de loin, de plus de dignité. Elle se fait pourtant à partir de particularités qui sont autant de chances et de difficultés spécifiques. A la lumière de ce qui précède, Jean-Baptiste Perret propose deux visions de la science et des SIC. « On sait que les Sic aujourd’hui, de l’aveu même de plusieurs de leurs chercheurs, souffrent d’un certain trouble de l’identité (Mucchielli, 2000 ; Jeanneret, 2001). Celui-ci s’exprime notamment par un « désir de disciplinarité », c’est-à-dire de la reconnaissance commune d’un paradigme unitaire. Cette situation est, semble-t-il, due au fait qu’il semble définitivement impossible de définir une théorie standard ».

Pour plus d’éclaircissement, il fait deux versants :

Ø  Sur le plan sociohistorique : le cercle du relativisme : une discipline est ce que les chercheurs qui l’animent décident qu’elle est. Son identité repose donc plus sur l’accord entre la communauté des chercheurs que sur des attendus conceptuels, et dépend avant tout de l’état des rapports de force entre eux ;

Ø  Sur le plan théorique : le cercle de la connaissance : tout jugement sur la pertinence ou la validité d’un énoncé repose lui-même sur la reconnaissance implicite d’un certain paradigme donc sur un autre jugement lui-même indémontrable. Dès lors il n’y a pas et il ne peut y avoir de définition scientifique de la scientificité, ni de « théorie d’une bonne théorie ».

Sans pouvoir éviter ces cercles, les tentatives de définition successives de l’Infocom, de la part de ses auteurs ou par des actes officiels, ont alternativement choisi deux pôles :

Ø  Le pôle socio-historique correspond à une définition pragmatique, par le domaine : des objets « concrets » sont considérés comme relevant de la communication. On dira alors que l’Infocom est une discipline qui s’intéresse aux activités de communication, et uniquement à celles-là. On considère donc qu’il y a des objets plus « communicationnels » que d’autres ;

Ø  Le pôle rationnel correspond à une définition conceptuelle ou théorique. Les objets sont théoriquement construits comme relevant de la communication. Il n’existe pas d’objets plus communicationnels que d’autres, l’essentiel réside dans le mode de traitement communicationnel des objets. Il s’agit d’alors d’adopter une « approche communicationnelle », sur n’importe quel objet, en droit.

En outre, il affirme que la définition des SIC se heurte à trois difficultés :  

Ø  La première difficulté de délimitation des objets en Sic tient au terme de « communication », qui présente le défaut de désigner des objets existant à la fois partout et nulle part ;

Ø  La deuxième difficulté tient au risque d’éparpillement : du fait de leur jeunesse, les Sic ont été et sont encore animées par des chercheurs venus d’autres disciplines. Tendance qui s’est poursuivie logiquement par la suite, les quelques étudiants formés à l’intérieur de la discipline y ayant fait l’objet d’un enseignement non spécifique à celle-ci ; les autres, en l’absence de recommandations claires, appliquant spontanément les grilles d’analyse de leur formation d’origine ;  

Ø  La dernière difficulté en dit long sur la construction scientifique des objets et sur la nature de l’organisation disciplinaire des connaissances en sciences humaines, si bien qu’il faut nous y appesantir un peu plus longuement.

Face à ces difficultés, il fait une remise en question qu’il intitule : vers un paradigme propre aux SIC ? Dans cette partie, il se demande s’il faut choisir entre les objets d’études concrets et la théorie, entre la dimension historique et la dimension rationnelle. Enfin, précise-t-il, « on voit mal, en droit, ce qui oblige les Sic à se fonder sur les paradigmes des autres et ce qui l’empêche de construire les objets à partir de son propre niveau de pertinence, à savoir le communicationnel ».

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 Note: Cette recension faite par l'étudiant BULONZA Enock s'inscrit dans le cadre de l'examen du cours d'Epistémologie de la Communication dispensé par le Professeur Vicky ELONGO. Master 2 Communications Sociales, Université Catholique du Congo ( 2021- 2022) 


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